Har rampèu ! (1)
Ce n’est pas un microbe, une bactérie. Non, la « chose » est indicible. Elle se glisse, subreptice, dans votre intimité, invisible et incroyablement présente. Elle ne s’arrête pas là. Pensez-donc ! Elle pénètre votre corps, s’y installe, s’agite et se répand illico dans votre sang, comme une terrible infection. « Elle est bien là ! », vous dites-vous. La voilà qui vous harcèle, vous lâche, et recommence. Elle vous murmure des mots effrayants qui vous ramènent à l’enfance quand la nuit était noire et vos mains froides, quand vous étiez seul au monde et appeliez « papà, mamà ! »… Bien sûr, vous ne vous laissez pas faire, vous tentez de l’expulser. Peine perdue, elle connaît toutes vos faiblesses, vos défenses, vos ressorts. Elle est en vous et avec vous. Votre cœur s’emballe, votre sang se glace, et vous ne savez que faire. Il est vrai que la nuit de vendredi-dernier, vous aviez regardé, horrifié, la manifestation la plus aigüe de l’horreur. Vous étiez resté, des heures durant, à essayer de comprendre ce qui se déroulait sous vos yeux. Quand, fort tard, le sommeil enfui, le chiffre des victimes fut annoncé, l’évidence sanglante s’imposa. Alors, l’intruse arriva. Depuis lors, elle va et vient, ne vous lâche pas. Elle s’amuse de votre désarroi, de votre incapacité à réfléchir, comme à votre habitude. Pourtant, vous êtes un être de raison. Un citoyen qui pense et existe. Le 11 janvier dernier, déjà, vous aviez fait barrage à l’effroi et retrouvé vos esprits. Mais là, face à cette monstruosité, cet acte de guerre, commis par un commando de combattants djihadistes de l’Etat Islamique, la peur, puisque c’est d’elle qu’il s’agit, vous aveugle et vous perd. Pourtant, au tréfonds, une fragile lumière éclaire votre âme menacée. Elle réchauffe votre cœur et vous réveille. Alors, le courage vous prend et vous décidez d’être libre face à ce nouveau et terrifiant fascisme.
1. Résister.
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Murer la peur
Extrait d’un texte de Mia Couto, écrivain Mozambicain,
(...)
La peur fut, finalement, le maître qui m’a fait désapprendre. Quand j’ai quitté ma maison natale, une main invisible me volait le courage de vivre et l’audace d’être moi-même. A l’horizon, j’apercevais plus de murs que de routes. A cette époque, quelque chose me suggérait que, dans ce monde, la peur des mauvaises choses était plus importante que ne l’étaient les mauvaises choses elles-mêmes.
Dans le Mozambique colonial où je suis né et où j’ai grandi, le récit de la peur avait un casting international que le monde nous envierait : des chinois qui mangeaient les enfants, des dits terroristes qui luttaient pour l’indépendance de leur pays et un athée barbu avec un nom allemand. Ces fantasmes ont mis fin à tous ces fantômes : ils sont morts quand la peur est morte. Les chinois ont ouverts des restaurants à côté de chez nous, les dits terroristes sont des gouvernants respectables et Karl Marx, l’athée barbu, est un sympathique grand-père qui n’a laissé aucune descendance.
Le prix de cette construction narrative de la peur a pourtant été tragique pour le continent africain. Au nom de la lutte contre le communisme, d’indicibles barbaries ont été commises. Au nom de la sécurité mondiale on a placé et conservé au pouvoir certains des dictateurs les plus sanguinaires que nous avons en mémoire. Le plus grave héritage de cette longue intervention externe est la façon dont ces élites africaines continuent d’accuser les autres de leurs propres échecs.
La Guerre Froide s’est refroidie mais le maniquéisme qui la soutenait n’a pas désarmé, inventant rapidement d’autres géographies de la peur en Orient et en Occident. Et parce qu’il s’agit de nouvelles entités démoniaques, les traditionnelles méthodes de gouvernement ne suffisent pas... Nous avons besoin d’intervention ayant une légitimité divine... Ce qui était idéologie est devenu croyance, ce qui était politique est devenu religion, ce qui était religion est devenu stratégie de pouvoir.
Pour fabriquer des armes, il faut fabriquer des ennemis. Pour produire des ennemis il est impérieux de créer des fantasmes. La fabrication de cette peur demande un dispositif coûteux et un bataillon de spécialistes qui, en secret, prennent des décisions en notre nom. Voici ce qu’ils nous disent : pour surmonter les menaces intérieures nous avons besoins de plus de policiers, de plus de prisons, de plus de services secrets, de plus de sécurité et de moins d’espace privé. Pour faire face aux menaces globales nous avons besoin de plus d’armées, de plus de services secrets et de l’abandon temporaire de notre citoyenneté. Nous savons tous que le vrai chemin doit être autre. Nous savons tous que cet autre chemin commencerait par le désir de mieux connaître ceux qui, d’un côté comme de l’autre, nous nommons “ ils”
Aux adversaires politiques et militaires s’ajoutent maintenant le climat, la démographie et les épidémies. Le sentiment qui s’est créé est le suivant : la réalité est dangereuse, la nature est traitre et l’humanité est imprévisible. Nous vivons – en tant que citoyens et espèce – en permanente situation d’urgence. Comme lors d’ un état de siège, les libertés individuelles doivent être contenues, la vie privée peut être envahie et la nationalité doit être suspendue. (...)
Il est symptomatique que l’unique construction humaine qui puisse être vue de l’espace soit une muraille. Celle que l’on appelle la Grande Muraille a été construite pour protéger la Chine des guerres et des invasions. La Muraille n’a pas évité les conflits et n’a pas arrêté les envahisseurs. Sans doute, plus de chinois sont morts lors de la construction de cette muraille que lors de ces fameuses invasions venues du Nord. On dit que certains des travailleurs qui sont morts ont été emmurés dans leur propre construction. Ces corps convertis en mur et en pierres sont une métaphore de combien la peur peut nous emprisonner.
Il y a des murs qui séparent les nations, il y a des murs qui divisent pauvres et riches. Mais il n’y a pas aujourd’hui de mur qui sépare ceux qui ont peur de ceux qui n’ont pas peur. Nous vivons sous les mêmes nuages gris, du sud au nord, de l’Occident à l’Orient... Je citerai Eduardo Galeano au sujet de cette peur globale :
“Ceux qui travaillent ont peur de perdre leur travail. Ceux qui ne travaillent pas ont peur de ne pas trouver de travail. Ceux qui n’ont pas peur de la faim, ont peur de la nourriture qu’ils mangent. Les civils ont peur des militaires, les militaires ont peur du manque d’armes, les armes ont peur de l’absence de guerres.”
Et, peut-être, ajouterai-je maintenant, y a-t-il ceux qui ont peur qu’on en finisse avec la peur.
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COMMUNIQUE
Le Grand Orient de France, dans les moments tragiques qui viennent d'ébranler notre société, est aux côtés des familles cruellement éprouvées par les actes barbares qui les endeuillent. Après les attentats du mois de janvier, il est manifeste que la France fait l'objet d'une offensive terroriste de grande ampleur qui s'en prend au modèle de civilisation dont notre République est l'héritière. L'heure est plus que jamais à la mobilisation pour que les ennemis sans visage qui nous menacent n'aient pas le dernier mot. Les Francs-Maçons, comme aux heures les plus sombres de notre Histoire, devront être aux avant-postes du combat pour la liberté et la dignité humaine.
Paris, le 14 novembre 2015
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Citoyens, amis, camarades, SS et FF,
Ce matin, au pied de ce monument, on été prononcés des discours saluant l’héroïsme de millions de soldats anonymes, morts au combat, et, dit-on, dans l’honneur et pour la France » dans ce conflit interminable et dévastateur que fut la guerre de 14/18.
Nulle intention, ni volonté de critiquer cette manifestation du souvenir , non pas des généraux et autres galonnés de la Grande Muette qui jouaient à la guerre dans leurs bureaux comme on joue aux dames, mais de tous ceux qui ont été envoyés à la boucherie, à une mort certaine pour servir des causes purement matérialistes au profit des intérêts de consortiums comme Krupp d’un côté et Schneider de l’autre, et encore d’autres causes plus politiques pour la plupart inavouées…
Manifestation du souvenir de ces hommes qui ne demandaient qu’à vivre, à aimer, à construire, mais qui crevaient dans les tranchées ou sous l’effet d’assauts imbéciles exigés par un Etat Major aux abois ou aux égaux surdimensionnés !
Souvenons de ce que disait Anatole France : « on croit mourir pour la patrie, et on meurt pour les industriels »….
Le GODF prend à nouveau la parole en ce jour de souvenir parce qu’il a pour sa part, commencé à se mobiliser dès 1935 pour exiger la réintégration dans la mémoire collective des fusillés pour l’exemple, des français et des étrangers volontaires de la guerre de 14/18 ;
A ce titre, et parce que, malgré de multiples promesses de différents responsables politiques, rien ou pratiquement rien n’a été fait à ce jour, il est normal que nous soyons présents ici avec toutes les associations citoyennes, laïques, pacifistes, républicaines, qui réclament Vérité, justice et Honneur.
Et qu’on ne s’y trompe pas, Ce combat vise à faire reconnaitre le droit à la désobéissance quand sa vie ou celle des autres en dépend, le droit d’avoir peur, le droit de refuser de tuer sans même savoir pourquoi, de se révolter contre la barbarie de la guerre, de refuser de se faire massacrer pour des intérêts particuliers. C’est aussi pour le respect de la liberté absolue de conscience, à laquelle nous sommes viscéralement attachés.
Au cours de cette guerre monstrueuse qui a fait plusieurs millions de morts au fond des tranchées et détruit autant de vies, 2500 soldats pris au hasard ont été condamnés et au moins 650 d’entre eux furent fusillés après des simulacres de procès. Et ne sont pas comptées toutes les exécutions sommaires qui n’ont jamais été recensées…
C’est Georges, Jean, François, Arsène, Pierre, Julien, et tant d’autres, camarades d’infortune, ouvriers, paysans, artisans, instituteurs, qui sont morts loin de chez eux, choisis au hasard, ou victimes de tribunaux militaires souvent improvisés, de conseils de guerre dignes de l’inquisition.
Où est le refus d’un ordre devant l’ennemi quand le soldat Bersot est fusillé pour avoir refusé le pantalon souillé d’un mort ?
Où est le refus d’un ordre devant l’ennemi quand le soldat Félix Baudy tombe sous les balles françaises du peloton d’exécution parce qu’il reviendra blessé d’une tranchée reprise par l’ennemi en Champagne ?
Alors, oui, Nous exigeons la réhabilitation pleine et entière de tous ces fusillés pour l’exemple ! C’est une œuvre de justice pour les victimes, pour leurs familles, pour leurs descendants.
Comme nous le cessons de le répéter, Ces soldats fusillés ne sont pas « morts pour la France », ils sont « morts par la France ».
Le pardon ne peut être la solution à cette situation car nous sommes en République et seuls les rapports à la légalité et à la justice peuvent être les références.
Nul doute que la France du XXI eme siècle, notre République, s’honorerait à reconnaitre sa faute d’alors, plutôt qu’à se voiler la face sur les aspects sombre de son histoire en tentant d’effacer ces faits des mémoires, en prononçant des réhabilitations « au cas par cas »…
Nous ne demandons ni une amnistie, ni un pardon, ni une belle phrase sur un monument, ni une place au Musée, nous attendons une réhabilitation collective.
Il ne s’agit pas d’un simple devoir de justice pour le passé, il s’agit aussi, en ces temps où tant de de troubles menaçants ressurgissent, d’un formidable message pour le présent et pour l’avenir, pour la Paix, pour que cessent enfin les dominations de peuples sur d’autres peuples,… d’un formidable message pour la liberté de conscience et de l’émancipation humaine.
Alors, puissent enfin nos élus entendre le cri des nombreuses manifestations pacifiques qui se déroulent aujourd’hui, et en tenir compte.
Pour les 6 Loges paloises du GODF, la réhabilitation totale et collective de ceux qu’on appelle « les fusillés pour l’exemple » est bien plus qu’une exigence, c’est un Devoir pour la République.
C’est ce que l’Humanité leur doit !
J’ai dit
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Discours de Françoise Michel Présidente de la Libre pensée 64
Amis, citoyens, camarades,
Je vous apporte ici le salut fraternel de la Fédération nationale de la Libre Pensée et de la Fédération nationale laïque des monuments pacifistes.
Il y a 101 ans commençait la plus effroyable des guerres qui allait dévaster le monde, le continent européen et les peuples. Le bilan est celui d’une barbarie jamais égalée à l’époque et qui sera amplifiée dans les guerres suivantes.
Il y eut 70 millions d’hommes mobilisés sous l’uniforme, 10 millions de soldats tués, 9 millions de civils assassinés. Un soldat sur 10 a connu l’emprisonnement dans les camps pendant la guerre. En France, ce sont 1 400 000 de soldats tués, 300 000 civils assassinés et 4 300 000 soldats blessés. La saignée fut telle que la France a perdu un quart de ses hommes de 18 à 24 ans.
Il y a 101 ans, les économies et les pays furent ruinés dans cette gigantesque barbarie. Les dépenses de guerre représentaient, durant le conflit, un quart des budgets des Etats en conflit. Le paradoxe, mais en est-ce un véritablement ?, est que cette guerre fut d’abord européenne et déboucha sur la ruine de l’Europe. Deux géants allaient naître de ce conflit : les États-Unis et la Russie soviétique.
Le capitalisme portait en lui la guerre comme la nuée porte l’orage.
Dans le déclenchement du conflit les torts furent largement partagés entre l’Allemagne et l’Autriche-Hongrie d’un côté et la Triple Alliance. Chacune des puissances voulaient gagner des parts de marchés et accroitre sa domination coloniale sur les peuples opprimés. On croyait mourir pour la Patrie, on mourait pour les industriels.
Le sang appelle toujours le sang. Il fallait d’abord une victime expiatoire, il fallait aux barbares terrasser d’abord l’homme qui se dressait pour empêcher la boucherie. Il leur fallait assassiner le grand Jaurès. « Pourquoi ont-ils tué Jaurès ? » On ne cesse de poser cette question, tellement elle est décisive.
Il y eut 639 Fusillés pour l’exemple durant ces années de guerre, victimes de la haine et l’injustice. . Leurs camarades et l’opinion démocratique combattirent inlassablement pour que l’honneur leur soit rendu. 40 furent réhabilités entre les deux guerres. Il en reste 600 dont il faut laver l’opprobre. Pour eux, pour leur famille, pour la République.
Le Président de la République s’est renié, une fois de plus. On n’a rien à attendre de lui. Il ne peut, en effet, envoyer la troupe aux quatre coins du monde pour les « opérations extérieures », et rendre justice à ceux qui ont dit non à la guerre.
C’est le peuple souverain qui prononcera la réhabilitation collective des 639 Fusillés pour l’exemple de 1914-1918. La République, c’est nous. La Libre Pensée a pris l’initiative d’ériger un monument sur la ligne de Front. Nous graverons dans le marbre de l’Histoire cette devise du Bureau international du Travail : « Si tu veux la paix, cultive la justice ».
Amis, Citoyens, Camarades,
Les militaires, les patrons et les curés veulent faire tourner la roue de l’Histoire. Ce sont toujours les peuples que l’on saigne et que l’on tue.
Ils ont tué Jaurès, mais ils n’ont pu tuer son enseignement. Voici ce que disait le premier exécuté pour l’exemple de la Première Guerre mondiale. Jaurès reprenait Victor Hugo : « La liberté commence où l’ignorance finit ».
« Quelle connerie la guerre » (Prévert)
Vive la sociale !
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- Histoire du monde ouvrier 11 L’Europe dans la tourmente (1906 1932)
- Les principales obédiences maçonniques
- Appel des consciences laïques et humanistes: Tribune de 7 Obédiences maçonniques françaises, dont le Grand Orient de France, publiée sur le site de MEDIAPART le 3 novembre 2015
- Syrie : Nous ne pouvons pas ignorer- "raqqa is being slaughtered silently-"