Allocution du VM le 16 juin 2107 après les élections du nouveau collèges des OFF

MMTTCCFF et SS,

C’est donc ma dernière prise de parole en tant que VM dans ce temple. C’est avec une certaine émotion, vous le comprendrez que je vais prononcer quelques mots. Non pas une émotion provoquée par ma descente, non, mais au contraire par la joie, l’enthousiasme, et la fierté de voir un nouveau collège s’installer aux commandes. A sa tête, mon frère, mon ami, mon confrère, plus frère que con, Philippe, dont vous savez tous les liens forts et confiants, fidèles et loyaux, qui nous unissent. Il est en plus mon maitre en hypnose, ce qui vous verrez, installé à ce plateau vous réservera bien des surprises.
Bon vent Vénérable Maitre mon frère, et sois confiant, les forces vives du Réveil sont derrière toi, au-delà des postures et des calculs, au-delà des luttes d’influence et des pressions.
Tu as composé ton collège seul et en toute indépendance. Certains, y compris même parfois à Bayonne, ont cherché à savoir et à intriguer. Tu as résisté aux bidouilles, et c’est ainsi qu’il faut procéder.
Certains officiers de ton collège, ont eu des votes contraires ce soir. Je n’y vois là que le prix à payer pour leur indépendance et leur liberté de paroles. Je les en félicite. Désormais la souveraineté de la Loge a frappé de son sceau définitif la légitimité de ce collège et il aura donc, sans faille, mon soutien, ma loyauté et mes encouragements.

Mes interventions éventuelles seront discrètes et seulement provoquées par tes sollicitations mon Très Cher Vénérable Maitre. A condition, pour parler clair, qu’il n’y en ait pas un qui commence à te casser les bijoux de famille, dont je sais que tu les as fragiles. Tu verras, au fur et à mesure des tenues, elles ont une propension certaines à se blinder. Quoiqu’il en soit, je ne supporterai pas pour toi, ce que j’ai supporté pour moi dans l’intérêt de la Loge. Je récupère aujourd’hui ma liberté de parole et elle sera toujours à ton service, tu le sais. Et je connais maintenant les coulisses et les intrigants. Je serai toujours présent si tu me sollicites, mais uniquement, si tu me sollicites.

Je n’ai pas voulu être candidat au Conseil d’Administration de notre association, malgré les nombreuses demandes que j’ai reçues, y compris de ta part. Je m’en excuse mais, en mon âme et conscience, j’ai considéré que ce n’était pas ma place, car ce n’est pas à mon sens, dans la philosophie de nos textes et de nos engagements. Je m’appliquerai strictement l’Article 23 de notre règlement général. Je le cite : « Nul Frère ayant occupé des fonctions électives ne peut s’en prévaloir une fois le mandat terminé, et/ou s’exonérer de son obligation de réserve, quelle que soit la fonction anciennement occupée. » Autrement dit, un Ancien Vénérable Maitre, cela n’existe pas. Je serai couvreur probablement pour trois ans, et ensuite un frère comme n’importe lequel sur les colonnes. Loin d’être une faiblesse, c’est une force. C’est par son travail et son implication, que l’on se légitimise, pas par l’occupation de fonctions que l’on occupe indéfiniment.

Je souhaite également bonne chance à notre F Christian, Président réélu. Qu’il voit dans cette réélection, la marque de confiance des FF et SS de la Loge, mais aussi, un encouragement à travailler dans le respect scrupuleux de nos textes qui ont été votés à l’unanimité. Avec l’Architecte de la Loge, comme le précise l’article 46 de notre Règlement Général, tu auras à veiller, Christian, avec Georges, sur notre patrimoine et tu découvriras les fructueuses vertus des décisions prises en commun et en toute transparence, et tu auras pour ce faire, tout mon soutien exigeant. Il te faudra rompre définitivement avec les pratiques du passé. Tu as tout pour y arriver, ton talent, ta diplomatie. Je te souhaite sincèrement bonne chance et bon courage. Je te redis ma fraternité.

Quant à mon Vénéralat, je n’en ferai pas de bilan. Je ne regarde pas le passé et ne suis pas nostalgique. La loge jugera. Si dans quelques années subsistent encore des traces du passage de mon collège, j’espère de tout cœur, que l’on oublie très vite quels en ont été les auteurs, car on s’en fout. On entend parfois dire : « c’est quand j’étais VM que j’ai fait cela ou cela. » C’est une monstruosité intellectuelle et une usurpation : ce n’est pas le VM qui fait ou qui a fait. Ce n’est pas non plus le collège. Mais c’est bien la Loge par son expression démocratique garante de sa souveraineté. Alors si durant ces trois ans nous avons parfois commis, par hasard, inadvertance et par chance, quelques belles choses, c’est bien à vous que doit aller ma reconnaissance, mes FF et mes SS, car c’est vous qui avez fait, et en tant que VM, je vous en remercie.

Mes pensées vont à mon collège, plutôt au collège de la Loge, ce collège qu’elle m’a confié. Je sais, j’ai été exigeant, parfois fatigant. Il m’a fallu du temps pour comprendre que j’allais parfois un peu vite. Mais à chaque fois la loge a tranché. Ce collège a beaucoup travaillé, a été d’une loyauté inespérée et qui a exaspéré quelques frères bien peu respectueux de la démocratie. Mes FF et SS du collège, vous avez pris des risques, subi des pressions, mais vous avez tenu bon, et vous avez toujours été d’un soutien touchant et revivifiant. Vous avez tous progressé dans votre parcours initiatique et j’en suis heureux. Bravo à tous et merci, vraiment merci, aux Surveillants dévoués, à l’Orateur courageux, au secrétaire fidèle à la besogne, aux GE au pluriel qui ont fait de nos cérémonies « les plus belles tenues auxquelles ils ont assisté », ce sont les mots des visiteurs, au Trésorier rigoureux et fraternel, à l’Hospitalier solidaire, au M des Cer libre parmi les libres, au FCouvreur M parmi les M, aux M au pluriel des Col d’Har inventifs, à l’Archiviste impertinent, à l’Architecte Président, aux M des Ban au pluriel, extraordinaires de dévouement et d’adaptation, à tous les adjoints impliqués, au Maitre de la Toile loyal et besogneux, aux commissaires aux comptes incorruptibles. Tous, vous avez transformé profondément le Réveil et ce , de façon irreversible.

Pas de bilan factuel mais je parlerai pourtant de deux choses qui resteront à jamais gravées dans ma mémoire. Deux épisodes qui resteront de ce Vénéralat.
Le premier donc, notre déplacement à Dargilan, où chacun s’est dépassé pour faire de ces deux tenues des réussites exceptionnelles. Grace à Damien, nous avons ainsi pu montrer combien nos forces mises en commun pouvaient surmonter bien des obstacles. Les notes de la cabrette, cette corne muse locale de Lozère, résonnant entre les stalagmites et les stalactites, charment encore mes oreilles incrédules. Les gouttes d’eau effrayantes tombant sur mon ordinateur apoplectique, rythment encore mes nuits courtes et enjouées. Oui, ce fut un grand moment de fraternité où nos familles ont pris toute leur place. 170 repas en deux jours. Je me rappelle encore les mots de satisfaction et d’encouragement de notre Frère Jean Delfaud qui a compris peut-être ce jour-là notre volonté commune d’œuvrer pour le bien de nos FF et SS avec détermination.
Le deuxième évènement marquant fut bouleversant : la tenue funèbre à l’intention particulière de nos FF Georges Chapuis, Roger Bonnan, et Gérard Lanneau. Les larmes de Dolores, celles de la famille de Roger, et celles de nos apprentis ont témoignées que nous étions dans le bon registre. Qu’elles étaient belles les paroles de nos apprentis Jean Pierre et Patrice, qu’elle était belle la dignité de nos « trumeaux » comme ils aiment à se nommer et la pudeur de notre sœur Muriel, et celle de Georges, parrain de Gérard. Tenue mémorable à la mémoire de nos disparus, sans doute une des plus belles que j’ai eues à diriger. Et ma reconnaissance va une fois encore à ce collège qui prépara l’évènement avec la conscience aigüe de l’enjeu. Ce matin-là, nous avons porté haut les valeurs maçonniques en présence de nombreux profanes. Encore aujourd’hui, je me demande d’où est venue cette égrégore exceptionnelle.

Cet éphémère passage au premier maillet, n’est qu’un épiphénomène au regard de la pérennité de nos valeurs.  J’en ai pourtant retiré beaucoup de richesses. Merci à ceux qui m’ont soutenu, aidé, encouragé, manifester par leur vote toujours large l’adhésion à nos projets. Merci pour les mails reçus : 10 793 en trois ans, 4 127 envoyés, rien que pour la Loge, sans compter la Région et le National. Merci de m’avoir montré vos valeurs et de vous être parfois surpassés.
Mais merci aussi à ceux qui m’ont montré ce que la maçonnerie ne devait pas être : un lieu de pouvoir, d’intrigues, de pressions, de chantages, de mensonges et de calomnies. Ils m’ont, sans le vouloir, beaucoup aidé et conforté dans ma détermination. Ils m’ont, en attaquant ma famille, rappelé si c’était nécessaire combien je tenais à elle, combien elle m’était précieuse, et combien j’ai pu compter sur le soutien de Véronique et de mes enfants qui me sont essentiels, alors qu’eux ne me sont que dérisoires… Et les archives de la loge, que j’ai lues, relues, copiées et recopiées et qui m’ont tant éclairé, comme les témoignages des FF qui ont quitté notre atelier, sur la vraie nature des choses. Jusqu’à l’affaire lamentable de ces médailles volées par l’un d’entre nous. Spectacle pitoyable de la maçonnerie dévoyée.

Mais il y a eu des moments beaucoup plus nombreux et tellement plus germinaux, et des rencontres, qui se reconnaitront, merveilleuses. Merci à tous ceux qui font partie maintenant de mon environnement quotidien. Ils m’honorent. Et eux, savent, vraiment.

J’ai bénéficié de plusieurs atouts : mon ancienneté avant d’accéder au vénéralat, le fait que j’ai refusé deux fois d’être candidat à ce poste, (j’ai pris mon temps, je voulais être prêt) et, cerise sur le gâteau, d’avoir pu proposer à la sagesse de la Loge, et mon prédécesseur, et mon successeur. L’action de nos collèges s’inscrit donc dans la durée, avec nos différences et nos complémentarités salutaires. Merci à Gilbert d’avoir ouvert la voie et de m’avoir tant appris. Merci à Philippe d’avoir accepté d’être mon successeur dès la préparation de ma propre candidature. Nous avons tous les trois travaillé en confiance et en complémentarité. Je souligne également que le Réveil est un atelier extrêmement légitimiste, et c’est heureux, et que, depuis plusieurs années maintenant, nous pouvons compter sur des Orateurs courageux et pertinents.

Je terminerai en exprimant le seul conseil que je vous donnerai. Soyez vous-mêmes, soyez persévérants, soyez déterminés, soyez bienveillants et fraternels. Si vous avez des ambitions et des besoins de reconnaissance, vous n’êtes pas libres. Un Franc Maçon se doit de l’être. Jaugez au prisme de nos valeurs les actions que vous entreprendrez. Acceptez la critique mais jamais la compromission. Acceptez le consensus mais jamais le renoncement à vos engagements. N’essayez jamais de plaire car vous vous fragiliseriez. Et en toute occasion, soyez dignes et ne vous abaissez jamais. Et l’on ne s’abaisse jamais lorsque l’on reconnait ses erreurs. J’en ai fait. Vous avez su me le dire et j’ai pu parfois m’amender. Pas toujours. Enfin, soyez fiers d’être maçons et maçonnes et rendez-vous toujours utiles. Et lorsque vous doutez, souvenez-vous de votre testament philosophique.

Maintenant je vais descendre… et dès ce soir… D’ailleurs, j’enlève ma cravate. Ce soir, je considère que la légitimité de la direction de la Loge, c’est notre Frère Premier Surveillant qui l’incarne. D’ici l’installation de notre VM, j’expédierai les affaires courantes en totale concertation avec lui. Je lui remettrai l’ensemble des archives dont je dispose, c’est-à-dire les miennes et celles de Gilbert. Je lui remettrai les clefs que l’on m’a confiées à l’exception de celles des placards que notre Président a conservées. Enfin, la totalité des livres, cadeaux et marques de sympathies que j’ai eues lors de ce mandat. Car cela ne m’appartient pas, car c’est bien le représentant de la Loge qui en a bénéficié, et c’est donc bien la Loge qui en est propriétaire. A elle donc de faire la poussière dessus, ce qui aura en outre l’avantage non négligeable de dégager une étagère de mon bureau. Je pourrai ainsi y mettre ma collection de macramés à laquelle je compte désormais me consacrer. Il faut bien que je m’occupe…

Et puis je vais regarder avec plaisir, la loge évoluer sous cette nouvelle impulsion. Je suis un homme d’action, mais également un contemplatif. A la lueur fraiche des aubes nouvelles, je me pose souvent sous le scintillement mourant des étoiles qui s’effacent. Les sommets de nos montagnes veillent comme les géants sur Wotan. La tourmente du monde s’apaise, le silence intérieur fait écho au vol discret des chants des oiseaux. Les volutes de brumes des méandres aqueux parcourent la vallée endormie et masquent l’horreur des actions humaines inhumaines. Dans ces moments de calme et de paix, j’imagine ma loge, ce Réveil du Béarn que j’aime comme j’aime les forces vives qui la composent, inventer son avenir, créer son demain, dépasser toujours en mieux le passé, adapter pour le monde qui change nos textes, nos statuts, nos règlements, nos rituels, et écrire et dire des planches toujours plus belles, agir avec toujours plus d’humilité et de conscience, de tolérance, de respect et de liberté, à la construction d’un temple toujours plus beau.
Et puis, il m’arrive, dans le silence, de jouer avec le tracé des nuages hauts dans le bleu pâle du ciel, rosis par l’aurore, animés par l’énergie du jour qui commence, de l’aube nouvelle : j’y vois des dessins qui se forment et se déforment et se reforment dans mon imaginaire… une épée, une truelle, un fil à plomb, une équerre… qu’irisent les reflets chatoyant des rayons encore frais… et puis parfois les nuages se délitent comme la morosité devant l’égrégore, les masses deviennent des lignes épurées, les paroles écrivent des mots que vous reconnaitrez :
Se renier c’est se dissoudre,
Ne te courbe que pour aimer,

Longue vie au Réveil, longue vie à son Collège, et longue vie à son Vénérable Maître.

J’ai dit.

Xavier Alzieu, V :. M :.  du Réveil du Béarn.

Se renier, c’est se dissoudre.
https://www.lereveildubearn.fr/

                

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