Une Europe humaniste est-elle encore possible face à la montée des extrêmes.
Commençons par un constat :
L’Europe, ou plutôt l’Union européenne, est aujourd’hui contestée. Victime de la crise économique et des politiques d’austérité, une partie de ces citoyens se détournent du projet européen.
Taux d’abstention élevé aux dernières élections européennes, crise de l’euro, critiques contre Bruxelles, clivages entre l’Europe du Nord, supposée vertueuse, et l’Europe du Sud, possible référendum sur l’Europe en Grande Bretagne…
Les partis et courants extrémistes profitent de cette situation.
Le projet européen est de plus en plus décrié par les opinions publiques. Les eurosceptiques gagnent du terrain.
Le dernier scrutin européen l’a malheureusement confirmé.
Dans la grande majorité des pays de l’Union Européenne, les partis populistes ont réalisé des scores impressionnants : 19 % en Autriche, 25 % en France, 38 % en Grande Bretagne.
Leur recette ? A chaque problème, ils offrent invariablement les mêmes réponses : c’est la faute de l’immigration, de l’Europe et les élites.
Populiste, ces mouvements se sont construit une façade respectable, captent l’adhésion de citoyens toujours plus nombreux.
A travers cette planche, nous tenterons, modestement, tant le sujet est vaste et passionnant, d’apporter notre réflexion d’apprentis francs-maçons.
Pourquoi l’idéal européen, naguère encensé, s’est-il affadi ? Quelles erreurs ont été commises ?
Comment expliquer le succès grandissant des idées véhiculées par les formations d’extrême droite. ? Sont-elles en marche vers le pouvoir ? L’Union européenne est-elle condamnée ?
Enfin, quelles sont les solutions et comment nous, francs-maçons, pouvons y contribuer ?
L’idée d’Europe et l’idéal européen
La volonté d’une Europe unie, garantissant la paix pour ses peuples et la stabilité économique et sociale est une idée qui a germé bien avant l’après deuxième guerre mondiale.
L’importance de l’idée d’Europe est bien antérieure à celle de la construction européenne.
Bien entendu, l’objet de cette planche n’est pas de traiter de l’évolution de l’idée européenne : de l’unité politique de l’empire carolingien, aux tentatives napoléoniennes ou hitlériennes d’une Europe hégémonique exaltant le nationalisme, en passant par l’homogénéité chrétienne de l’Europe médiévale, l’idée Européenne a connu, au cours des siècles passés, de multiples conceptions.
Néanmoins, dès les 18ème et 19ème siècles, différents mouvements politiques et intellectuels envisagèrent la création de fédérations d’états européens, basées sur un rapprochement pacifique des états.
Victor Hugo fut l’un des précurseurs de la construction européenne. Il fut le premier à parler, en juillet 1851, des États-Unis d’Europe, afin de déboucher sur une Europe irriguée par la vérité et la justice. Déclaration qui vaut d’ailleurs à Victor Hugo le qualificatif de grand père de l’Europe.
Nous avons donc choisi de circonscrire nos réflexions aux dernières décennies, celles qui ont été marquées par le processus de création européenne engagé dès l’après-guerre :
- Dès 1947, avec la création du Conseil de l’Europe (traité de Londres – Europe des 47) et de la Cour européenne des droits de l’Homme, chargées de garantir le respect des droits fondamentaux.
- La construction européenne initiée par ses pères fondateurs : Robert Schuman , Jean Monnet, Konrad Adenauer entre autres : Traité de Paris en 1951, instaurant la CECA, Traité de Rome en 1952, instaurant la Communauté Européenne, qui pose comme base les idéaux de la construction de l’Europe : Maintien de relations pacifiques entre les états, conséquence des tragédies de la seconde guerre mondiale et enjeu de réconciliation des peuples.
Aujourd’hui, après plus d’un demi-siècle d’efforts consacrés à la réalisation de cet objectif, plusieurs constatations s’imposent.
La justification première de la construction européenne était de rendre impossible un nouveau conflit entre les anciens belligérants et, plus de soixante-cinq ans après la fin de la seconde guerre mondiale, la menace d’un recours aux armes entre ces derniers paraît tout à fait irréelle.
Les pays de l’Union européenne se sont montrés fort exigeants quant à l’affirmation, la défense et l’approfondissement des droits et des libertés.
En étant fondée initialement sur des objectifs essentiellement économiques, l’Union européenne a aussi eu pour premier objectif de garantir aux opérateurs économiques la liberté de circulation la plus large. Le texte initial du Traité de Rome en est le parfait exemple, puisqu’il porte quasi-exclusivement sur la construction économique et la création d’un espace de prospérité.
L’idéal européen de prospérité partagée à l’intérieur de l’Union est bel et bien au coeur des ambitions inscrites dans le projet des pères fondateurs et des états précurseurs de l’Europe.
Pour être plus précis, l’idéal européen, cette ambition d’une Europe Humaniste, doit se traduire par :
Une Europe qui défend l’égalité de ses citoyens, qui promeut la liberté individuelle, la liberté de pensée, de croyance et qui place la laïcité comme un principe fondateur.
- Une Europe qui par son action assure à ses citoyens un développement économique performant et garantit leur prospérité, une Europe qui permette à chaque citoyen de vivre et travailler de manière digne et décente partout sur son territoire.
Mais après plus d’un demi-siècle de construction européenne, quel est notre constat ?
L’Europe qui se construit depuis bientôt plusieurs générations est, et a été, dès le départ un espace de progrès et de grandes avancées sociales : droit à l’avortement, abolition de la peine de mort, droit des femmes, des enfants, liberté dans l’orientation sexuelle, mariage pour tous.
- L’abolition de la peine de mort est aujourd’hui réelle en Europe puisqu’elle est interdite à tout Etat membre de la Convention européenne des droits de l’Homme et désormais gravée dans le marbre de notre Constitution.
- La lutte contre les discriminations figure également parmi les priorités de l’Union européenne. Par exemple, elle prohibe toute interdiction de discrimination fondée sur le sexe. L’Europe a contribué à la suppression progressive de toute discrimination entre les enfants dits naturels, légitimes et dits adultérins dans le droit français.
On pourrait multiplier les exemples.
Force est de constater que la confiance en l’Europe, entité politique et économique, ne fait plus l’unanimité.
La désaffection des citoyens envers l’Europe, qu’elle soit politique, économique ou sociale est de plus en plus marquée.
Nous avons choisi deux sondages récents qui illustrent ce « désamour », voire ce rejet de l’Europe :
Selon en sondage CSA BFMTV-Nice matin de avril 2014, à la question « Diriez vous que l’appartenance de la France à l’Union européenne est une bonne chose ou une mauvaise chose » 38 % des sondés répondent une mauvaise chose et 11 % ne se prononcent pas.
Selon le sondage Eurobaromètre de mars 2014, 59% des Européens n’ont plutôt pas confiance dans l’UE tandis que 32% ont plutôt confiance en elle. Les 9% restants n’ont pas d’opinion sur le sujet.
Les taux de participations aux dernières Européennes sont aussi révélateurs : 42% en France, 33% au Portugal, 35% au Royaume Uni, 60 % en Grèce, seulement 42 % au niveau Européen.
De tels résultats, au delà de la faiblesse de l’engagement des citoyens qu’ils traduisent, interrogent même sur la légitimité de l’Union Européenne.
Pourquoi une proportion de plus en plus importante de français, d’européens, n’ont plus envie de l’Europe ?
Est ce que parce qu’ils ne la comprennent pas, parce qu’ils pensent qu’elle ne les écoute pas ? Parce qu’elle n’a pas su et ne sait toujours pas intégrer et promouvoir les valeurs que nous souhaitons lui voir promouvoir ? Surement – en partie-
Pour autant cette Europe mal aimée que fait elle pour se rendre attrayante ? Les instances Européennes savent elles communiquer efficacement ? Visiblement non et ce déficit de communication est en partie fondé sur la difficulté qu’ont ces mêmes citoyens à percevoir et intégrer cette entité dans leur quotidien.
A toutes ces questions, voici les réponses que nous avons tenté d’apporter :
Les fondements de la construction européenne ont été avant tout économiques, le bien être social devant être la conséquence d’un développement économique favorable.
L’ouverture des marchés, la libre concurrence et l’absence d’une régulation mondiale suffisante ont produit une concurrence sociale entre travailleurs de différents pays et parfois même au sein d’un même pays.
L’intégration des pays de l’est a suscité beaucoup d’espoir, elle a finalement provoqué bien des frustrations dans ces pays, du fait des effets pervers de l’adhésion, comme l’augmentation des prix et la croissance des inégalités.
Les attentes étaient claires : amélioration du niveau de vie, recul de la corruption, hausse des salaires et création d’emplois.
Depuis le Traité de Rome, l’intégration européenne est marquée par le déséquilibre institutionnel entre les politiques qui font le marché et relèvent de l’échelon européen et les politiques sociales et redistributives qui le corrigent, mais qui elles demeurent pour l’essentiel de la compétence des Etats.
Cet état de choses est dû à la fois au choix fait d’une unification par le marché et aux réticences des états nationaux et des peuples de voir l’Union s’immiscer dans le champ social.
L’ensemble des dispositifs de protection sociale et d’emploi constitutifs de l’état social sont en effet profondément enracinés dans les frontières nationales.
L’intégration économique, qui repose sur le rapprochement des législations des Etats membres en matière économique, rencontre dans certains domaines de fortes résistances rendant très difficiles tout mouvement d’unification ou d’harmonisation européenne.
Une telle situation a ouvert la voie à des comportements opportunistes, par lesquels les opérateurs économiques cherchent à intervenir sur un marché national particulier tout en évitant les contraintes sociales, considérées comme exagérément restrictives.
La concurrence des modèles sociaux au sein de l’Europe est une des raisons de la désaffection actuelle des citoyens par rapport au projet européen.
La montée des extrêmes : l’Union européenne face aux défis de l’extrémisme
Dans la situation actuelle que nous venons de décrire, le projet européen est face à plusieurs défis. L’un des plus grands est de répondre à la montée des extrêmes que ce soit l’extrémisme religieux ou politique.
Les partis d’extrême droite critiquent sans concession l’Europe tel qu’elle se construit depuis 1992 (Maastricht). Ces partis extrémistes diabolisent le projet européen et ses intentions.
Commençons par la montée de l’extrémisme politique !
Quelle est notre définition de l’extrémisme politique ? C’est le nationalisme xénophobe à base ethnique. La xénophobie anti-immigrés représente la traduction politique la plus visible.
Il y a une forte dimension identitaire dans le discours de l’extrême droite en Europe.
Le nationalisme politique utilise également d’autres ressorts : diabolisation des élites, recours à la théorie du complot.
Dans le contexte actuel, où chacun peut avoir le sentiment qu’il est victime des choix des acteurs publics, le discours extrémiste dénonce avec facilité le « tous pourris » des responsables politiques. Ce discours séduit !
L’extrême droite perce dans de nombreux pays, également là où elle n’avait pas prospéré : Royaume Uni, avec le Parti National Britannique, la Grèce, avec l’Alerte populaire Orthodoxe…).
Le nationalisme régional séduit également les partis d’extrême droite tel qu’en Italie avec la Ligue du Nord ou en Belgique avec le Vlaams Belang et la Nouvelle alliance flamande. Sans oublier la Grèce et le parti néonazi incarné par Aube dorée …
On peut, nous semble t-il, distinguer l’extrémisme de la prospérité (en Belgique flamande, aux Pays Bas, en Suisse, en Italie du Nord), construit sur une inquiétude réelle ou fantasmée que provoque l’arrivée massive d’immigrés sur le sol national, perçue comme une menace pour la prospérité économique.
Mais également un extrémisme des exclus (comme en France ou en Autriche) : La réaction identitaire et xénophobe y concerne plus particulièrement les classes populaires et ouvrières qui vivent l’immigration comme une concurrence, dans un contexte économique et social difficile. Les bénéfices de l’Etat providence devant être réservés aux seuls nationaux. A ce titre, on peut affirmer qu’en France, le Front National est bien devenu un parti ouvrier.
L’extrême droite a un discours en résonance avec les inquiétudes des opinions publiques européennes. Le nationalisme identitaire lui se nourrit du déficit d’identité dont souffre l’Union Européenne qui peine à se définir sur les plans culturels et géographiques et n’a pas su offrir aux européens un autre cadre de référence auquel s’identifier.
On peut s’interroger : l’extrémisme politique, est-ce une attitude, celui de l’Homme européen qui se sent menacé dans son identité et sa traditionnelle domination du monde ?
La crise actuelle favorise les réflexes de repli, les opinions xénophobes, les sentiments hostiles à l’immigration et opposé à l’avènement des sociétés multi-culturelles (la peur du métissage).
La montée du nationalisme identitaire, qui est un nationalisme fermé, d’exclusion, est en forte hausse : son credo, c’est la défense de l’identité nationale menacée de l’extérieure et de l’intérieur.
Cette idéologie repose sur une vision ethnique et non politique (ou civique) de la nation. Les partis nationalistes se servent de la peur du déclassement comme un leurre pour attirer l’électorat dans un vote extrémiste.
Il faut s’inquiéter de ce phénomène et ne pas nier l’efficacité de cette opération de séduction de l’idéologie d’extrême droite.
La vigilance et la contre-argumentation s’imposent. Nous vivons un changement dans l’idéologie classique de l’extrême droite où l’heure n’est plus à railler les accoutrements des skinheads, et mépriser avec nonchalance les discours ouvertement racistes.
Aujourd’hui, nombreux sont les pays européens où les partis d’extrême droite obtiennent désormais des scores élevés, parfois avec des systèmes électoraux permettant de faire partie de coalitions gouvernementales, ou constituer des majorités de droite (tel que l’Autriche ou encore la Hongrie, suit une dérive autoritaire nationaliste menée par Viktor Orban).
La mondialisation économique est perçue comme directement responsable des délocalisations et donc du chômage, et l’étranger est, on le sait, l’utile bouc émissaire.
Cet étranger menaçant qui amène avec lui une immigration musulmane accusée de dénaturer l’Europe chrétienne occidentale.
L’influence politique des partis extrémistes se fait désormais sentir dans l’orientation des politiques. En effet, les discours extrémistes sont repris par les partis classiques afin de conserver ou récupérer l’électorat séduit par les solutions simplistes et radicales.
La récupération de ces discours par les droites traditionnelles est également de nature à inquiéter. Le succès que ces thématiques rencontrent auprès des partis de droite traditionnelle atteste de la perméabilité idéologique actuelle. Il y a une réelle captation idéologique (pour mémoire, en France, dès 2007, par le siphonage d’une partie de l’électorat du FN par récupération des thématiques sécuritaires et migratoires).
Cet emprunt au discours extrémiste a permis un temps de marginaliser les partis d’extrême droite, traduit pourtant à sa manière une banalisation du discours. Or, les électeurs préféreront in fine l’original à la copie. Cet original dont ils n’ont encore jamais fait l’expérience au niveau national.
La France n’est pas la seule concernée. Par exemple, l’utilisation à des fins purement électoraliste de David Cameron en jouant sur le retour d’une identité nationale retrouvée, sa volonté menaçante de sortir de l’Union européenne, de la Convention européenne des droits de l’Homme. En bref, trop d’Europe, pas assez de souveraineté.
On constate également, sans que cela puisse être comparable, dans sa forme et dans son fond aux discours de l’extrémisme identitaire et national, un rejet de plus en plus marqué de la part de certains partis traditionnels.
Le cadre national est perçu comme la forme la plus pertinente pour défendre l’identité des peuples d’Europe. Vive hostilité à l’encontre de la construction européenne depuis que celle ci a accélérée le transfert de certaines compétences nationales vers les instances fédérales, à partir du Traité de Maastricht.
La responsabilité de nos partis républicains est engagée.
Concernant maintenant l’extrémisme religieux :
A titre liminaire, il va de soi que les conceptions philosophiques, religieuses d’une personne, sa propre manière d’appréhender sa vie personnelle et sociale représente l’une des assises d’une société démocratique. C’est un acquis nécessaire pour les croyants, athées, les sceptiques ou les indifférents…
Nous pouvions légitimement penser que nos sociétés étaient sécularisées, pourtant il n’en est rien.
La religion est omniprésente tant dans l’actualité politique et sociale : les phénomènes religieux étant, par nature, des phénomènes publics. Toutefois, la dichotomie entre la chose sacrée et la chose profane doit rester dans la sphère privée.
Le premier axe inquiétant est la confrontation virulente entre la conception de la famille, l’appréhension des rôles sexués et celle de l’autonomie individuelle.
Les manifestations contre le mariage homosexuel en France en témoignent. Les sentiments religieux conduisent à troubler les réformes sociétales.
A ce titre, le mariage homosexuel changerait le modèle « naturel » de la famille selon le dogme du christianisme, de l’islam ou de la religion juive. Le sociologue Denis Pelletier affirmait que «renvoyer les extrémistes à leur fanatisme, c’est exonérer le religieux de toute « responsabilité » dans la violence». L’enjeu est ici.
Retour de l’extrémisme religieux encore avec la remise en cause du droit à l’avortement dans certains pays (Espagne, Portugal…).
Pour autant, faut-il y voir le signe d’un retour de la religion dans nos sociétés européennes ? A l’évidence, les pratiques religieuses en Europe sont diverses et la France fait figure d’exception. En effet, la croyance se porte bien dans l’Union européenne (cf. lobby religieux au sein des institutions européennes).
Jacques Delors soulignait qu’il était « impossible de mettre en pratique les potentialités de Maastricht sans spiritualité », en prévenant que « si, dans les dix ans qui viennent, nous n’avons pas réussi à donner une âme, une spiritualité, une signification à l’Europe, nous aurons perdu la partie ».
Aujourd’hui, la réflexion sur le sens spirituel et éthique de la construction européenne paraît lointaine et sinueuse.
Les réformes portées sur les sujets de société donnent du grain à moudre aux extrémistes religieux conservateurs. La fronde renaissante française s’inscrit un mouvement plus de fond de protection de la morale catholique. La modernité libérale est vue comme un ennemi du catholicisme.
La faute à l’ ultra-libéralisme et la mondialisation exacerbée ?
On constate une condamnation plus générale de l’ouverture provoquée par la mondialisation, à laquelle l’Union européenne est supposée avoir fait allégeance.
L’Union européenne, c’est pour beaucoup, l’instrument du mondialisme et des ultra-libéraux.
Nous pensons qu’il s’agit là d’une certaine forme d’extrémisme. Si nous considérons que l’économie de marché et l’entreprenariat privé sont des éléments essentiels à l’épanouissement et la prospérité de l’être humain, il nous parait néanmoins que l’absence de régulation créé un rapport de forces qui fait des faibles la proie des plus forts.
C’est en cela que l’ultralibéralisme est un extrémisme et l’Europe n’est plus, aux yeux du citoyen, le cadre protecteur face aux excès de la mondialisation.
Au contraire elle les favorise : ouverture économique, avec accélération des échanges, compétitions plus rudes entre les économies nationales, l’actualité du TAFTA nous le rappelle.
Quelles sont les réponses ?
Le constat que nous venons de dresser est plutôt sombre : défiance envers l’Europe, désaffection actuelle des citoyens par rapport au projet européen.
Le projet européen est-il dans une impasse ? Quelles sont les réponses à apporter ?
L’Union européenne peine à apporter des réponses satisfaisantes, hésitant dans la définition de son identité et de ses valeurs.
Nous l’avons vu, les risques sont réels : l’extrémisme tire profit des doutes qui se manifestent dans les opinions publiques à l’encontre de la construction européenne.
Il y a un creusement de l’absence de relations affectives que les citoyens européens entretiennent avec l’Union Européenne, empêchant l’identification d’un « nous » communautaire.
Les leaders politiques européens ont la lourde responsabilité de n’avoir pas su se rapprocher des citoyens et les sensibiliser aux enjeux des débats communautaires et de l’intégration, de sorte que l’Union Européenne est restée un mystère, l’opposée d’une réalité familière et vécue.
Nous pensons que la montée de l’extrême droite et des extrémismes en particulier n’est pas un phénomène conjoncturel qui disparaitra à l’amélioration de la situation socio-économique.
L’Union Européenne doit se réinterroger sur la responsabilité qu’elle porte dans cette percée, qui est d’une certaine manière, le reflet de son incapacité à convaincre les citoyens de la finalité de son projet, et aussi de la frilosité à affirmer ce qu’elle est et ce qu’elle n’est pas.
Aujourd’hui, nous l’affirmons, l’Union européenne ne peut faire l’impasse d’un débat sur son identité et sur ces valeurs.
Mais il s’agit aussi de réformer l’Union Européenne.
Nous sommes confrontés aux limites des traités, pour lesquels, compte tenu des contraintes, il semble difficile d’en envisager une révision.
Pourtant, la crise a mis en évidence les limites de la gouvernance économique et politique de l’Union.
Il nous faut donc renforcer l’intégration européenne.
- En développant une gouvernance efficace.
- En adaptant les outils institutionnels.
- En étoffant le budget européen.
- En formalisant un projet d’Union politique.
- En développant la citoyenneté européenne.
Nous, franc-maçons, nous devons contribuer à réaffirmer et relancer cet idéal européen de prospérité partagé à l’intérieur de l’Union.
Pour cela, il s’agit de renforcer l’Europe politique, de militer pour une Union Européenne inclusive et solidaire.
Au delà des propositions faites plus haut pour donner plus de forces à l’Union Européenne, il nous semble qu’il faut, tout simplement, renforcer l’Europe politique.
Une refondation de la gouvernance économique s’impose.
L’Europe politique doit mieux protéger le citoyen face à une mondialisation débridée. Il faut établir un nouvel équilibre politique entre la responsabilité financière et budgétaire.
Il faut également donner à l’Europe les moyens de relancer l’économie (en investissant dans la recherche, les énergies renouvelables, la modernisation des infrastructures économiques, en instaurant la solidarité nécessaire avec les états membres les plus durement touchés par la crise).
Il faut également reconstruire, repenser la démocratie européenne. En imaginant une Europe fédérale et en finir avec l’Europe des accords intergouvernementaux qui renforcent le déficit démocratique de l’Europe actuelle.
Les partis politiques, les gouvernements et la société civile doivent mener ce débat.
Les élections européennes du printemps dernier n’ont malheureusement pas été l’occasion d’une grande confrontation entre les projets politiques en faveur ou contre l’Europe. La franc-maçonnerie doit prendre toute sa place dans ce débat, si ce n’est l’initier et le porter.
Pour conclure,
Organiser une nouvelle souveraineté post-nationale européenne, aller vers une république fédérale européenne et démocratique, galvaniser le peuple européen !
L’Europe tel qu’elle existe fonctionne mal, répond mal aux crises auxquelles nous sommes confrontés. L’Extrémisme fait son miel de cette situation. Il y a péril en la demeure.
Il faut que les forces politiques parlent enfin de leur vision de l’Europe pour demain.
Nous, maçons, avons une responsabilité en cela.
Travail collestif 7 novembre 2014