Le Temps
Le passé, le présent, l’avenir, voilà donc nos 3 temps. Dans son essai « L’entre temps » André COMTE SPONVILLE soutient pour sa part que seul existe le temps présent. Le passé ne se vit que du présent, et c’est le souvenir, l’avenir ne s’imagine aussi que de maintenant et c’est l’anticipation.
LE TEMPS
VMet vous tous mes FFen vos grades et qualités, je tenterai de traiter dans cette planche du TEMPS.
Le temps nous pose à tous des interrogations auxquelles chacun de nous tente de répondre. Le temps, la durée ne sont que des concepts relatifs.
Quelle commune mesure entre le temps humain, 100 ans, le temps historique, 2 000 ans, le temps préhistorique, 100 000 à plusieurs millions d’années, le temps spatial et la création de l’univers estimée à 15 milliards d’années. Dans l’histoire de l’humanité il faut séparer le temps morphologique du temps culturel. Il y a 7 millions et demi d’année est apparu sur terre le premier primate : l’australopithèque. L’homo habilis apparait il y a 2 millions et demi d’année, l’homo erectus, 1 million 800 mille ans. Néandertal est né il y a 100 000 ans, Cro-Magnon, qui représente l’homme moderne 35 000 ans. Il a fallu 1 million d’année pour changer d’espèce et 100 000 ans pour changer à l’intérieur de l’espèce. Dans 70 000 ans l’homme aura une boite crânienne ronde alors que pour l’instant elle est aplatie sur l’arrière et qu’elle avait une forme oblongue chez l’australopithèque. Le temps culturel suit une courbe parallèle. L’Homo habilis a un langage articulé et invente l’outil. Il mesure 1mêtre 20.L’homo erectus 1,8 millions d’années découvre la notion de la symétrie, donc la notion du beau. En effet ce n’est pas la beauté qui rend l’objet efficace. L’homme de Neandertal, 400 000 ans, domestique le feu, qui devient un facteur d’hominisation. On fait cuire les aliments, et on les mange autour du feu, d’où socialisation et convivialité. L’homme de Cro-Magnon, 35 000 ans, enterre ses morts avec des rites funéraires, s’interroge sur l’au-delà et donc prend conscience du temps. Il s’interroge, d’où l’émergence de la pensée religieuse et la naissance de l’angoisse métaphysique. L’homme de 30 000 ans invente l’art, donc découvre la pensée symbolique. L’homme de 7 000 ans devient agriculteur et pasteur, donc produit lui-même sa nourriture. Il n’est plus seulement chasseur et vivant de la cueillette. Il a une action sur sa nourriture. Il y a 7 000 ans l’homme a pris conscience du temps car il s’est mis à cultiver et à élever et faire reproduire des animaux. Il a donc du inventer des calendriers pour connaître les périodes favorables à ses activités. Pour fixer l’idée de la durée de l’humanité imaginons que toute l’histoire de l’homme tienne dans une année. Le 1er janvier à 0 heure l’homo habilis apparait (2.5 millions d’années). Le 15 juin (1,5 millions d’années) l’homme arrive sur les rives de l’Europe méridionale. Le 15 novembre, soit 400 000 ans, il découvre le feu. Le 18 décembre, soit 100 000 ans, c’est la pensée religieuse qui apparaît. Le 28 décembre (30 000 ans) il invente l’Art et découvre le symbolisme.Le 31 décembre à 10 heures il devient agriculteur et pasteur, et le 31 décembre à 23 h 50, le 19ème siècle découvre la révolution industrielle.
Avec l’âge nous prenons conscience de la durée, donc du temps qui nous sépare de notre naissance, et que nous mesurons, et de celui qui nous amène à la mort, temps dont nous avons conscience du fini mais non de la durée. Pour ma part, lorsque je repasse le film de ma vie, je mesure en partie le temps passé. Cette mesure est cependant purement intellectuelle. Que représentent ces années, comment se sont-elles déroulées, comment auraient-elles pu être différentes ?
Le temps tout autour de nous y fait référence. La grammaire tout d’abord. Quels sont les principaux temps : le passé simple, le présent, le futur simple. J’existai, j’existe, j’existerai. Tout se complique avec le passé composé, j’ai existé, le passé antérieur, j’eus existé, le futur antérieur, j’aurai existé ; je passe les modes du subjonctif et du conditionnel. Le temps existe-t-il ainsi ? Le passé existe, ou plutôt a existé, le futur existe ou plutôt existera. Et le présent existe-t-il ou va-t-il exister ?
Saint Augustin donne une définition du temps qui peut apporter une réponse. »Ce qui m’apparaît maintenant avec la clarté de l’évidence, c’est que l’avenir ni le passé n’existent. Ce n’est pas user de termes propres que de dire « Il y a 3 temps, le passé, le présent et l’avenir. »Peut être dira-t-on plus justement »Il y a 3 temps : le présent du passé, le présent du présent et le présent du futur « .Car ces 3 sortes de temps existent dans notre esprit, et je ne les vois pas ailleurs. Le présent du passé c’est la mémoire, le présent du présent c’est l’intuition directe, le présent de l’avenir c’est l’attente. » Ces temps là cependant ne sont pas les temps réels mais les temps de l’esprit. On peut aussi soutenir qu’en fait le présent n’existe pas. Le moment présent est soit du futur, soit du passé. Le moment d’existence est déjà passé, dans une durée finie connue, ou un devenir dans une durée inconnue mais finie. Si notre réflexion va vers le temps sidéral le passé n’est plus fini, l’avenir non plus. En effet comment peut-on imaginer la création de l’Univers et sa fin. Avant la première molécule qu’éxistait-il ? Rien diront les déistes, Dieu seulement, mais qui est éternel. Ce n’est que reporter l’interrogation. Après la dernière molécule qu’existera-t-il ? Rien, sinon Dieu diront les déistes. Là aussi on ne reporte que l’interrogation. En d’autres termes peut-on imaginer un temps fini, c’est à dire avec un début et une fin. Mais qu’y avait-il avant ce début ? Le néant, mais rien ne peut sortir du néant. Qu’y aura-t-il après ? Le néant aussi mais où ce qui existait aura-t-il disparu ? Bien entendu je n’ai pas la prétention de répondre à ces questions qui agitent l’humanité depuis ses débuts. Je crois cependant que cette question fondamentale peut éventuellement trouver sa réponse dans chacun d’entre nous. Les religions et les croyances tout au cours du temps ont tenté d’apporter une réponse à ces interrogations souvent, pour ne pas dire toujours, avec dogmatisme. La constitution du Grand Orient de France dans son article premier permet justement à chacun d’entre nous d’accepter ou non ces réponses.
Le passé, le présent, l’avenir, voilà donc nos 3 temps. Dans son essai « L’entre temps » André COMTE SPONVILLE soutient pour sa part que seul existe le temps présent. Le passé ne se vit que du présent, et c’est le souvenir, l’avenir ne s’imagine aussi que de maintenant et c’est l’anticipation. Nous n’avons conscience du temps que parce que nous le mesurons à l’aide d’outils physiques, palpables, le sablier, la pendule, la montre. Le temps n’a pas de réalité, il a seulement des effets, effets que l’homme voudrait controler. Dans une nouvelle de Primo LEVI un savant invente un médicament, le « parachrone », qui a pour effet de dilater le temps. Les moments heureux s’allongent, les difficiles ou tristes se réduisent. Le spéléologue, Michel SIFFRE, a mené des expériences intéressantes sur les chronorythmes chez l’homme, donc la perception biologique du temps par le corps humain. Enfermé dans une grotte il a vécu d’abord en 1962, puis en 1972,ensuite fin1999, sans pouvoir mesurer le temps. Les premiers mois son rythme était de 24 heures 30 avec dans le temps un décalage d’une demi-heure par jour. Rentrée dans la grotte le 16 juillet, ressorti le 17 septembre il se croyait le 20 aout. D’autres expériences démontrent que plus la durée d’isolement est longue plus le corps change de rythme pour passer d’un rythme circadien (24 heures ) à un rythme de 48 heures. Ces expériences ont permis de valider des thérapies dites de chronopharmacologie qui permettent à des gens insomniaques de retrouver le rythme circadien.
Le temps a été divisé en secondes, minutes, heures pour en mesurer la durée. On pourrait croire que cette durée est égale quel que soit le moment ou le lieu. Albert EINSTEIN a pourtant démontré que tel n’était pas le cas dans sa théorie de la Relativité.Pour l’illustrer et la schématiser rappelons l’exemple des « Jumeaux de Langevin « . Cette expérience imaginée a été vérifiée par l’expérimentation au niveau des particules élémentaires. Deux jumeaux que nous appellerons Paul et Pierre, sont tous les deux âgés de 20 ans. Paul effectue un long voyage dans l’espace à une vitesse proche de celle de la lumière alors que Pierre reste sur terre à cultiver son jardin. Paul se trouve donc dans une fusée dont la vitesse est proche de 300 000 kms à la seconde soit à l’heure 1 milliard 80 millions de kms. Au départ Paul et Pierre ont bien tous les deux, 20 ans, au retour de Paul ce n’est plus vrai. Il a vieilli moins vite que son frère. En fait il a vieilli biologiquement au même rythme, mais durant moins longtemps. Si ce voyage a duré 2 ans Paul aura 22 ans alors que Pierre dans son jardin aura vieilli de 14 ans et aura donc 34 ans. On voit bien que le temps est relatif. La distance spatiale entre deux évènements n’est pas la même suivant le lieu de l’observation. Une salière que fait tomber une hôtesse de l’air dans le couloir d’un avion ne tombe pas au même endroit selon que cet incident est observé par un passager ou par une vache qui regarde l’avion passer.En effet durant le temps nécessaire à la chute, l’avion aura parcouru quelques dizaines ou centaines de mètres suivant qu’il s’agit d’un AIRBUS ou du CONCORDE.
Les astronomes d’ailleurs, observent des étoiles à des milliers d’années lumière qui se sont éteintes ou qui n’existent plus.
On ne peut imaginer le temps sans l’espace, l’espace sans la matière. Où était le commencement ? Le monde scientifique fait remonter l’existence de notre galaxie au big-bang. Imaginons un univers hyper condensé dont on ne connaît ni le volume, ni la structure. Des milliards de milliards de grammes par centimètre cube et des centaines de milliards de degrés. Et cela se passait il y a 15 milliards d’années.
L’Univers a existé lorsque cette température s’est refroidie pour atteindre 1 000 milliards de milliards de milliards de degrés. Et cela s’est passé une fraction de 10 puissance moins 43 secondes après l’explosion, c’est à dire 1 sur 10 suivi de 43 zéros !
Les scientifiques imaginent en sens inverse le big-crunch où la matière reviendrait à son état d’origine.
Et si l’Eternité n’était qu’une telle respiration de big-bang et de big-crunch ? Le Soleil pour sa part est un homme mûr, à la moitié de sa vie puisque né il y a 4,56 milliards d’années et dont la mort est annoncée dans 5 milliards d’années ! Le temps est indissociable, ou plus exactement associé avec l’espace, la matière l’énergie. Si nous revenons à EINSTEIN, la formule E=MC² associe bien l’énergie avec le temps. En effet qu’est-ce–que la vitesse si ce n’est un espace temps. L’énergie est égale à la masse multipliée par le carré de la vitesse de la lumière dans le vide. L’énergie dégagée dépend donc de la vitesse donc du temps. Le temps n’existe qu’à travers ce qui s’y passe. La succession des saisons montre bien cela. La vie des plantes et de tous les êtres vivants démontrent qu’ils occupent e temps. J’ai vu la vie d’une pomme ramenée au cinéma à quelques minutes. Il est étonnant de voir la fleur s’épanouir, donner une minuscule fruit qui va se développer, grossir, mûrir, se flétrir, pourrir et disparaître. C’est la vie de tout ce qui compose l’univers, de l’homme comme de la montagne. Les échelles de durées sont seulement différentes. Un autre procédé photographique, piloté par ordinateur, permet de voir à travers un visage d’enfant, l’évolution des traits jusqu’à la vieillesse, en passant par l’adolescence, l’âge adulte, l’âge mûr et la vieillesse. Le temps est passé par-là, ou le visage est passé par le temps.
En maçonnerie nous mesurons aussi le temps. A quelle heure les francs-maçons ouvrent-ils leurs travaux ? A midi. A quelle heure les terminent-ils ? A minuit. Quel âge avons-nous ? 3 ans pour certains plus pour d’autres (je ne dévoilerai pas ici des secrets maçonniques ). Les saisons aussi ont leur influence : la fête solsticiale. Les frères apprentis doivent garder le silence une année. Notre constitution intègre aussi le temps maçonnique : « Institution essentiellement philanthropique, philosophique et progressive » Dans ce dernier mot s’inscrit le temps, le temps où nous manions la truelle pour nous améliorer, améliorer l’humanité, aller vers la Connaissance et la Vérité, sans d’ailleurs les atteindre. La pierre n’est jamais totalement polie et le Temple jamais achevé.
Symboliquement, le temps a souvent été représenté par la rosace ou la roue. Le centre du cercle est alors considéré comme l’aspect immuable de l’Etre, alors que le cercle, la circonférence, est mobile.
La métaphore de Marc Aurèle donne aussi une idée du temps. »Le temps est un fleuve fait d’évènements ». Dans ce fleuve, nul ne peut se baigner 2 fois de suite dans la même eau. Il est impossible que le fleuve se fige comme un arrêt sur image. Le mouvement est inscrit dans le temps, comme le temps dans le mouvement.
L’homme à toute époque a cherché à mesurer le temps ; cadran solaire, clepsydre, sablier, et à partir du 13ème siècle l’horloge, puis plus tard la montre permettant de porter la mesure du temps d’abord dans son gousset, maintenant à son poignet. Après avoir mesuré le temps avec l’heure, la minute, la seconde nous en sommes maintenant au 1/100ème de seconde et à la nano-seconde.
Le temps atomique international a été défini à partir de la vibration de l’atome de césium. Il constitue l’échelle du temps officiel. Cette échelle coïncidait avec l’échelle du temps universel le 1èr janvier 1958. L’écart entre ces 2 temps est d’environ une seconde par an. Aussi en 1972 a été défini un temps légal, le temps universel coordonné (utc) établi à partir du temps universel et du temps atomique international.
En fait plus que le temps ce qui intéresse l’homme, sont les confins du temps. Le temps importe moins que d’où il vient et où il va. Que faisons-nous dans cet espace temps ? Quel y est notre rôle, notre utilité. S’interroger sur le temps, c’est s’interroger sur l’existence de Dieu et en revenir à la nuit des temps c’est se poser la question : comment et par qui ?
Quelle est notre place dans le temps, cette galaxie composée de milliards d’étoiles, côtoyant d’autres milliards de galaxie toujours en expansion ? Ecoutons Jean Rostand : »Comme tout animal supérieur, l’homme est un agrégat de plusieurs trillions de cellules, dont chacune représente un assemblage de cellules diverses. En ce qui concerne la pensée, orgueil principal de l’homme, les pièces maîtresses de l’architecture biologique sont constituées par des cellules de l’écorce cérébrale. C’est là dans cette pellicule que se produisent les réactions et les transformations d’énergie qui donnent lieu à ce que nous appelons la conscience, et dont nous ne savons rien sinon qu’elle est indissolublement liée à ces réactions et à la transformation »Il rajoutait : »L’homme n’est pas l’œuvre d’une volonté lucide. Sa naissance ne faisait partie d’aucun programme. » Le temps est-il contemporain de la matière ou l’Univers est-il né dans le temps ? St Augustin, toujours lui, au IVème siècle, dans son »Petit livre des confessions » dit que Dieu a inventé le purgatoire pour ceux qui se posent cette question. Que de questions nous pouvons nous poser sur le temps ! Il est temps cependant que je cesse de discourir du temps, et pour que cette planche ne semble pas durer une éternité, je la terminerai donc par 2 citations, la première de RONSARD :
« Le temps s’en va, le temps s’en va, Madame, Las ! Le temps non, mais nous nous en allons » la seconde de Woody ALLEN : » L’Eternité c’est long, surtout vers la fin…. »
J’ai dit.
| Lu le 03/07/2006 | Apprenti