Le tablier de l’Apprenti

Le tablier de l’Apprenti
Qu’il est confortable d’être apprenti, à l’abri de la lumière aveuglante, à l’ombre de la Colonne du nord.

  « Le Tablier de l’apprenti »
Introduction :
Qu’il est confortable d’être apprenti, à l’abri de la lumière aveuglante, à l’ombre de la Colonne du nord. Depuis plus d’un an, je prends ce que mes FF:. me donnent. J’observe, je m’instruis à vos côtés, j’écoute et j’essaie de comprendre, ce qui n’est pas toujours simple. Cette année m’a permis d’entendre plusieurs planches de qualité, et parfois j’en venais à redouter le moment où je devrai plancher à mon tour. Ce moment appréhendé est arrivé, je dois donner, et c’est là que je m’aperçois, au moment de procéder à l’esquisse de mon premier tracé, que je sais si peu de choses.
Comment aborder cette étape délicate : fallait-il chercher à éblouir, à trouver les mots qui permettraient de briller, voire d’impressionner ?  C’est un peu dans cet état d’esprit que j’ai commencé à compulser des écrits, à rassembler les documents qui, je le pensai, me serviraient à peaufiner mon travail. J’ai lu, j’ai mis bout à bout les chapitres les plus intéressants, j’ai cherché à faire une savante synthèse des idées défendues dans ces ouvrages. Et quel sujet choisir ? La truelle, le compas, la Colonne du nord… Je me suis vite aperçu que je m’égarai, et j’ai réalisé que ce n’était pas ce que mes FF:. attendaient de moi. Je me suis rappelé que je ne savais ni lire ni écrire, et qu’il fallait que je reste simple, sans prétentions. J’ai donc choisi un thème en rapport avec l’apprenti que je suis. C’est pourquoi je vais évoquer le premier insigne de mon grade :
Le Tablier de l’apprenti :
Le tablier est l’élément essentiel du décor du Franc-Maçon. « Il est le véritable insigne des Francs-Maçons, qui doivent en être toujours revêtus en loge », comme le rappelle l’instruction pour le premier grade symbolique. Le jour de mon initiation, j’ai reçu des mains du V:. M:. ce tablier, ainsi que ces gants. Ces vêtements ont en commun leur couleur blanche, contraste saisissant après la sortie des ténèbres, après la sensation de noir ressentie dans le cabinet de réflexion et sous le bandeau. Je me rappelle, aujourd’hui, la planche de notre F:. Philippe, sur le pavé mosaïque, sur la complémentarité du blanc et du noir, sur le fait que l’un n’existerait pas sans l’autre.
Le blanc, combinaison de toutes les couleurs du spectre solaire, couleur de neige, est depuis toujours synonyme de pureté, de virginité. Il représente également l’innocence, la sérénité et la paix. Porté par les rois et les prêtres, le blanc est aussi le symbole de la puissance, de la connaissance initiatique. Couleur de joie, le blanc est associé au baptême, au mariage, à beaucoup de cérémonies tout au long de la vie. Couleur de peine également, les linceuls ne sont-ils pas fait de tissu  blanc ? En loge, le blanc nous rappelle, par le port des gants, que nos intentions sont pures, que les mains sont vierges de toute souillure.
Dés les premiers jours de l’humanité, nos lointains ancêtres cherchèrent à se protéger des rigueurs du froid et autres calamités climatiques. Personne n’avait encore eu l’idée d’inventer la machine à tisser. Les peaux d’animaux devinrent tout naturellement la protection idéale. Quand l’homme fut capable de travailler la pierre, ces peaux épaisses lui assurèrent le bouclier idéal contre les projections de toute sorte. Sans le savoir, il avait inventé le premier tablier. Cette invention avait de beaux jours devant elle. Plus tard, des générations de cordonniers, de forgerons, de maréchaux-ferrants profitèrent à leur tour de cette trouvaille.
Les tabliers maçonniques sont souvent fabriqués en peau, il faut peut-être y voir un héritage de ces traditions artisanales. Au temps des cathédrales, les apprentis tailleurs de pierre, encore malhabiles, devaient se préserver davantage des risques inhérents à leur activité. Leurs tabliers les couvraient certainement plus que celui de leurs Maîtres, rompus à ce périlleux exercice. De même, la bavette du tablier de l’apprenti Maçon doit être relevée, pour des raisons identiques. Il est intéressant de constater – de regretter ? – qu’en loge le tablier du Maître est plus grand que celui de l’apprenti et du compagnon ? L’inverse aurait semblé plus logique.
La peau utilisée pour nos tabliers est généralement celle de l’agneau. Depuis toujours, l’agneau est le symbole de la douceur, de la pureté, de l’innocence. Les religions l’utilisent souvent. Il est sacrifié au moment de la Pâque juive, en souvenir du passage de la mer rouge, d’après l’ancien testament. Dans la religion chrétienne, l’Agneau de Dieu représente Jésus, au moment de la communion.
Malheureusement, je n’ai pas encore acquis les connaissances nécessaires, afin d’expliquer le rôle de l’agneau en maçonnerie. Je sens qu’il en fait partie. Mais je préfère ne pas me risquer dans des interprétations que je suis encore loin de maîtriser. C’est pourquoi je sollicite l’aide des mes FF:., qui m’expliqueront la symbolique de l’agneau en loge, s’il y a lieu.
Outre le fait de protéger, le tablier peut aussi avoir une autre fonction. Quand j’étais collégien, le tablier, la blouse était obligatoire. Je fréquentais pourtant l’école publique. Ce vêtement était loin d’être un habit de lumière, tout au contraire. Il n’était pas blanc. Je garde plutôt un souvenir vert de gris, sans originalité, ni aucun chic. Les adolescents que nous étions n’appréciaient que modérément cet uniforme imposé. Si les garçons acceptaient tant bien que mal cette contrainte, les jeunes filles étaient les premières à quitter ce « sac informe » à l’heure de la sortie. Il était en effet important de pouvoir enfin séduire les apprentis mâles que nous étions, par le biais d’une petite jupe affriolante, ou de tout autre artifice dont ces demoiselles avaient le secret. J’ai compris bien plus tard la signification de ce tablier, exigé par une autorité certainement peu soucieuse d’uniquement protéger nos vêtements pendant les cours. J’y vois plutôt des soucis d’égalité, d’obligation de se concentrer uniquement sur le travail. Les riches, peu nombreux il est vrai, et les moins riches, issus comme moi de familles ouvrières, se retrouvaient en cours sur un pied d’égalité. Il n’y avait pas de place pour les signes extérieurs qui auraient pu perturber l’attention nécessaire au bon déroulement des cours. Voilà certainement à quoi servaient nos tabliers.
Cet aspect d’égalité, et cette notion de travail est indispensable à l’heure où les Francs-maçons entrent en loge. Après avoir laissé les métaux à la porte, revêtu  les gants et le tablier sur le parvis, les FF:. pénètrent dans le Temple. Le tablier rappelle alors que nous ne pourrons accomplir notre mission qu’en travaillant. « Il rappelle au Franc-Maçon qu’il doit consacrer sa vie tout entière au labeur. » comme le rappelle l’instruction pour le premier grade symbolique…
J’ai pleinement conscience de l’imperfection de mon ébauche, la pierre mérite encore d’être taillée. Mais j’ai confiance en mon Maître, je sais qu’il saura me guider à parfaire mon ouvrage.
« J’ai dit »
 
 
 
 Lu le 31/10/2006 | Apprenti

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