Le monde change
Au début du XXème siècle on pensait que nos enfants vivraient plus ou moins comme nous. Aujourd’hui nous n’avons qu’une très vague idée de ce que sera le monde à l’heure de notre mort.
Le monde change et change de plus en plus vite.
Le monde change
Disparition des modèles familiaux, indécidabilité logique, naissance et mort des communismes, relativité d’Einstein, incertitude d’Heisenberg, libération de la femme, morts des idéologies, délocalisation, monté des extrémismes, récession américaine, sécurité sociale, financiarisation, téléphone portable, voyages spatiaux, éveil de la chine, existentialisme, globalisation, congés payés, télévision, TGV, droit de grève, guerre de l’eau, génétique, middle class, Internet, guerres de masse, FMI, OMC, OMS, ONG, ONU, RTT, email, Freud, Jung.
En un siècle le monde a muté.
Le monde change et change de plus en plus vite. A quelques années à peine du troisième millénaire, le monde entier est malade : les uns s’interrogent, parfois avec désespoir, sur le sens de leur vie et de notre commune histoire ; d’autres, plus gravement atteints par la désintégration d’une civilisation, ne se posent même plus de questions ; ils vivent, si l’on peut appeler cela « vie » – en s’abandonnant aux dérives, au sommeil de l’esprit qui engendre les monstres : rêvant d’un bonheur de supermarché et de charter, d’acheter plus, sans savoir pourquoi, d’aller plus vite, sans se demander où. Parfois aussi tout casser, puisque l’ordre que l’on nous a fait n’a guère plus de sens que les épaves de la casse. D’où la succession de certaines transes, de certaines crises, qui caractérisent nos sociétés actuelles : A l’Est, à l’Ouest et au Sud…
Au début du XXème siècle on pensait que nos enfants vivraient plus ou moins comme nous. Aujourd’hui nous n’avons qu’une très vague idée de ce que sera le monde à l’heure de notre mort.
Le monde change et change de plus en plus vite.
1. Dans ce monde en mutation auto-catalytique, que deviennent le franc Maçon et ses combats ?
Nous allons essayer de vous donner ici la vision des apprentis de notre atelier, de nouveaux venus dans le monde maçonnique sur ce sujet.
Pour cela nous comparerons un apprenti de la « Belle Epoque », des années 1900, et un apprenti d’aujourd’hui, puis leurs environnements respectifs.
Prenons donc un apprenti de 1900 et disséquons-le. Verbalement, j’entends. Vous pouvez ranger vos bistouris !
Qui est-il ce franc maçon ? Il fait partie des catégories sociales les plus culturellement privilégiées ou alors il a toutes les chances d’être un militaire, il est préoccupé par des questions franco-françaises comme la guerre avec nos voisins, les lois sur la séparation des églises et de l’état, la naissance des droits civiques, des droits syndicaux, la protection de la République, la construction, voire plus tard, la reconstruction des structures et lieux maçonniques etc…. Enfin bref, il avait bien du travail en France et de toute façon peu de moyen d’agir et de connaître plus globalement ce qui l’entourait.
Enfin ce Franc Macon est persuadé de pouvoir changer le monde.
Disséquons maintenant un apprenti d’aujourd’hui ………………………… Lui par exemple. Vous pouvez sortir vos bistouris…
La culture et les outils de réflexions s’étant démocratisés, les colonnes représentent mieux la diversité sociale ; même si les catégories les plus en difficultés sont toujours quasi absentes. Les grands combats humaniste ont été menés et souvent gagnés sur le territoire national. Il y a encore bien du travail et nous devons rester très vigilants pour éviter tout retour en arrière (voir ce qui arrive avec la laïcité actuellement) mais les gros combats ne sont plus là.
Certes bien des choses restent à faire en France mais dans le reste du monde presque tout est à construire.
Lorsque l’on compare les problèmes de la société française avec ceux du Sud de Madagascar l’on voit rapidement où ce situe le juste combat et l’urgence.
Né en l’an 2000 avec 60 loges et 2200 frères pour 6 milliards d’être humain environ, la région monde du GODF est à peine balbutiante.
Face à ces enjeux colossaux, l’apprenti moderne, contrairement a son ainé, se sent bien faible. Mais cette sensation de ne pas savoir quoi et comment faire n’est pas causée que par la taille de cette tâche.
Le sociologue Beck explique que ce ressenti est dû à la mort des dieux puis des idéologies, à la dé-traditionalisation en général, qui, tout en libérant l’individu, augmentent ses incertitudes.
L’apprenti angoissé de cette seconde modernité aura de nombreux combats dans ce nouveau monde.
2. Mais qui a-t-il donc de si nouveau dans ce monde de la seconde modernité ?
Ses changements portent principalement sur 4 secteurs :
Diminution des distances
Accélération du temps
Répartition sur une large population des risques dus à la modernité elle-même (appelée modernité réflexive par Beck). Des exemples de cela sont l’Erika, Tchernobyl, la crise des «subprim», l’effet de serres, Seveso, le désamiantage, les réfugiés climatiques…)
Le quatrième secteur c’est la naissance de la société de l’information.
3. En quoi ces changements ont-ils une influence sur les combats et le travail du franc Maçon ?
Tout d’abord la diminution des distances agrandit la sphère de causalité. De plus en plus de problèmes deviennent impossibles à traiter localement ou bien des problèmes, qui ont l’air d’être bien lointains, impactent sur nous localement. Par exemple, comment traiter de manière profonde et durable les problèmes de chômage en France sans se soucier du dumping social et donc des conditions sociales ailleurs dans le monde ? Ou encore : d’ici quelques années, environ 55 millions de Bengalis devront déménager à cause de la montée des eaux. A peu prés l’équivalent de la population française. Si l’on ne traite pas cette situation en amont, toute cette région du monde sera déstabilisée. Et au premier chef l’Inde alors que nous en tirons une partie de notre croissance.
Le Maçon doit donc élargir sa vision au monde entier et replacer son travail dans une perspective mondiale, sans perdre de vue cependant les spécificités locales. Un indien ou un africain n’est pas un occidental.
Peut-on d’ailleurs toujours parler d’une Maçonnerie universelle quand tant de différences culturelles, d’appréciations différentes de la vie et de la mort, de la place de l’homme sur terre, existent entre deux régions du monde ?
Ensuite l’accélération du temps. Un exemple simple : La guerre. Il faut à peine quelques heures, au pire quelques jours pour envoyer des hommes et du matériel sur n’importe quel théâtre d’opération. Il faudra à peine quelques minutes au Pakistan pour envoyer des missiles nucléaires sur l’Inde (oui je sais je fais une fixation sur l’inde !!!). Là où, au début du siècle, il fallait des mois de préparations et, où les combats ou les batailles s’étendaient sur des mois ou des années, maintenant tout peut être détruit en quelques heures.
Il faut donc, pour le GODF en général et le Maçon en particulier, être capable de réagir très vite mais cela sans perdre le temps de la réflexion qui fait tout l’intérêt du travail Maçonnique.
4. Comment concilier ces deux contraintes apparemment opposées ?
En prévoyant plus encore que ne l’a jamais fait le Maçon. En réfléchissant extrêmement en amont aux problèmes qui se poseront dans le futur.
Bien sûr le Maçon n’a pas à se substituer au législateur ni aux gouvernants, mais peut on leur laisser exercer seuls cette responsabilité sans les inspirer fortement et surtout les sensibiliser à l’urgence des problèmes ?
Et ainsi éviter ce qui est arrivé avec le cas Dolly, le mouton cloné. Cas où le législateur a dû pondre une loi en urgence, sans grande réflexion et débat publique sur le clonage quand on savait depuis des années qu’un jour ou l’autre le problème se poserait. Combien ont déjà commencé à travailler sur ce qu’il convient d’interdire ou d’autoriser à propos des intelligences artificiels ou bien des robots humanoïdes ? Pourtant nous savons que le problème est ardu et qu’il se posera totalement dans moins de 10 ans.
Le jour où l’on ne pourra plus faire la différence au téléphone entre une Intelligence Artificielle et un humain, il sera trop tard pour savoir si c’est acceptable ou pas.
Le troisième secteur et vecteur de changement : La modernité réflexive. C’est-à-dire la mutualisation de fait des risques dus à la modernité. Jusqu’à 1980 à peu prés, le progrès c’était « dompter la nature ». De nos jours, le progrès c’est « dompter la modernité ».
Avant 1980 le progrès était toujours bienvenu puisqu’il amenait localement du confort. De nos jours, le progrès se traduit souvent par un risque pris en local ou bien ailleurs dans le monde. Et la multiplicité de ces risques fait que des catastrophes ont lieu. Il est désormais du rôle du Franc Maçon de regarder et de gérer ces risques : en apportant des propositions concrètes suite à des réflexions profondes et d’envergures.
Enfin la société de l’information : Aujourd’hui ce qui fait réellement valeur, ce qui fait réellement pourvoir, c’est l’information. On peut le déplorer. Moi non. L’information a cette faculté magique de pouvoir se donner sans rien perdre. C’est Gutenberg puissance mille.
Cependant ce n’est pas la vie rêvée des anges et il y a des effets pervers à cela. Par exemple : la France utilise l’information fournie par ses satellites espions pour les vendre, pardon les donner dans une démarche de coopération, à des gouvernements peu recommandables. Ou bien, Berlusconi, en détenant les canaux d’informations, fausse le jeu démocratique. De même, les valeurs opposées à celles du Franc Macon peuvent se reproduire à l’infini sur l’internet. Voire par exemple la nébuleuse ahurissante des sites d’extrême droite, très ciblés et extrêmement bien faits d’un point de vue de la communication.
Le GODF en général et le Franc Macon en particulier, par tradition et parce que chat échaudé craint l’eau froide sont réticents à l’extériorisation. Cependant, en refusant cette adaptation au siècle, il se passe des outils les plus puissants jamais mis à sa disposition pour ses combats, tout en laissant les extrémismes de tous poils maîtres des lieux et de leur mouvement.
5. Mais dans cette globalisation trépidante, angoissante et bruyante que deviennent les combat eux mêmes ?
S’ils n’ont pas changé sur le fond, leur forme, leur nom, leur mode ont dû ou doivent s’adapter à la polyculture de notre village globale.
La fondation des combats maçonniques c’est d’abord la liberté, l’égalité et la fraternité, sans oublier la solidarité. Ces quatre valeurs constituent le creuset des maçons.
Et à nouveau en filigrane se pose la question de la maçonnerie universelle, plus précisément de l’universalité des valeurs et outils maçonniques.
Ceci étant dit, le maçon considère ses valeurs comme étant bonnes. Et il se doit donc, pour être de « bonne foi », de les promouvoir et les répandre partout où il se trouve. A commencer en lui-même. Sans toutefois oublier un combat essentiel : celui de la laïcité.
Ceci le conduira à être vigilant, se questionner et questionner sur tous ce qui suit :
– Evidemment les droits de l’homme
– L’Ecologie globale
– La Gestion de l’information
– La Bioéthique
– L’Infoéthique
– La Liaison des ces deux dernières, la bioéthique et l’infoéthique avec la naissance de la biotique (la biotique c’est ce que en science fiction on appelle les cyborgs)
Il y a aussi la gestion des systèmes de destruction massive à faible cout (terrorisme biologique ou chimique)
– La gestion des systèmes de destruction perdurant (mines et bombes à sous munitions)
– La gestion des terrorismes inorganisé et donc incontrôlée, nés de trop de frustration
– La coévolution nécessaire de sociétés très différentes
– Et bien d’autres combats nous attendent……………….
On le voit, la plupart de ces difficultés n’acceptent que des solutions globales et une approche systémiques ou holistique ; une solution locale et/ou une approche cartésianiste ne feraient, dans le meilleur des cas, que déplacer les problèmes. Or de tels approches ou solutions globalisantes ne peuvent être mis en place qu’à travers une véritable gouvernance mondiale.
Ainsi le maçon a changé. Le monde change. Et la maçonnerie doit changer.
Il ne s’agit ni d’être pessimiste, ni d’être optimiste dans cette vision et dans ce vouloir. A l’intérieur du chaos, il existe des forces capables de le surmonter. Y parviendrons-nous ?
Churchill disait : « Pour s’améliorer, il faut changer. Donc, pour être parfait, il faut avoir changé souvent. ».
Si le GODF veut continuer son travail dans ce nouveau monde, il doit adapter ses combats, ses méthodes et ses points de vue à ce siècle.
On l’a vu le Maçon actuel doit avoir une vision plus globale qu’il n’en a jamais eu besoin, il doit regarder plus loin dans le temps et dans l’espace. Il doit utiliser plus d’information et en fournir au monde.
Et il faut qu’il fasse tout cela sans perdre son âme.
Lu le 24/03/2008 | Apprenti