Les Francs Maçons dans la Commune de Paris 1871

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Les Francs Maçons dans la Commune de Paris  1871

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L’avènement de la Commune des Paris, est jugé suffisamment important par le G.°.O.°.D.°.F.°., pour qu’il appelle tous les F.°. M.°. à se rassembler devant le Mur des Fédérés au cimetière du Père-Lachaise, tous les 1° Mai.
La Commune de Paris de 1871 est mal enseignée, voire occultée dans l’enseignement laïque et obligatoire, et même dans nos rangs. .
Pour ceux qui pénètrent pour la première fois dans ce pan d’histoire, je recommande : « Mes carnets rouges » de Maxime Vuillaume réédité en 2011 (ed La Découverte). Vuillaume ingénieur de mines et publiciste fut durant son exil le second de la construction du tunnel du Saint Gothard.

Mais pourquoi la Commune est elle si singulière. Comme l’écrit Auguste Arnould :

« …la Commune de Paris est PLUS et AUTRE CHOSE qu’un soulèvement. Elle fut un l’avènement d’un principe, l’affirmation d’une politique. En un mot elle ne fut pas une révolution de plus, elle fut une révolution nouvelle, portant dans les plis de son drapeau tout un programme original et caractéristique. »

La Commune établit un pouvoir d’une autre nature, je cite Auguste Arnould :

La première révolution s’appela : la proclamation des droits de l’Homme, – la THEORIE !
La seconde s’appelle : la Commune,- la PRATIQUE !
L’une était politique l’autre est sociale !

Cela reste d’une brûlante actualité. L’engagement des Francs Maçons dans cette révolution allait déterminer l’avenir de notre Ordre.

 

 

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La maçonnerie dans les révolutions :

Les historiens débattent beaucoup sur la part de la maçonnerie dans les Révolutions françaises. Je vais éviter de trop détailler pour n’être pas dans l’érudition historique mais davantage dans le sens, le courrant des idées.
La société médiévale est une société de castes comme certains pays encore aujourd’hui. La maçonnerie médiévale réalise l’union des trois ordres.
A l’intérieur tous égaux!  Ou « free maçon  tous pareils ».
Du moins jusqu’à un certain point car les peuples des compagnons ne pratiquent pas tout à fait la même maçonnerie que les clercs. Mais ils ont en commun un but : la liberté de passer et de penser. Et c’est une réalité pour les charpentiers et maçons, escribouilles, imagiers, etc…, qui peuvent se déplacer quand le serf est attaché à un fief. La liberté de penser passe par un certain nombre de subterfuges, comme l’art du grimoire et du rebus. Mais là aussi les clercs ne pratiquent pas le même : eux qui maîtrisent le Grec et le Latin.
Maintenant allons faire un tour au musée Carnavalet. Au travers du mobilier et en particulier de la porcelaine, vous verrez de très nombreux symboles maçonniques avec au premier rang le niveau. Logique ! ( cf. aussi « Franc-Maçonnerie et Faïences»  Nevers Palais Ducal ed C Ghivasky juin 2000)
Ce qui frappe c’est la permanence de la représentation de l’union des trois ordres, sous des formes symboliques assez diverses.
Il ne s’agissait pas de supprimer la noblesse, mais d’abolir les privilèges. La révolution de 1789 réalise pour le peuple, ce que la maçonnerie médiévale faisait dans ces ateliers.
Ce qui fera dire à des auteurs comme Gracet d’Orcet, que cette maçonnerie ayant atteint son but s’était en quelque sorte sabordée. Les liens avec la nouvelle maçonnerie spéculative ne se faisant, alors que par des hommes en tant que tels.

En 1871, dans le Paris assiégé, conformément à leurs idéaux, des Francs Maçons  s’avancent pour tenter une conciliation avec Adolphe Tiers. C’est à l’initiative de la Loge Les Disciples du Progrès. Le Secrétaire Général du GO est prévenu le 8 Avril pour une rencontre le 9. Le manifeste de la Loge est tiré à des milliers d’exemplaires. La rencontre aura lieu en fait le 11 Avril. Conduite par Montanier, c’est un échec. Montanier le 15 Avril termine son compte-rendu par ces mots :

« La Franc Maçonnerie va tenter de nouveaux efforts et elle ne s’arrêtera que quand il aura été démontré que tous les moyens d’action sont désormais impuissants à conjurer le mal »

Le même jour un débat est organisé par Les Disciples du Progrès. On débat de l’interposition des Francs Maçons , bannières déployées, entre les combattants mais aussi de combattre les versaillais s’ils n’acceptent pas de conciliation.
Le 27 Avril la loge Le Globe de Vincennes appelle à une assemblée générale le 29 au Châtelet. La Rose Ecossaise déclare que la Commune est le nouveau Temple de Salomon.
Les Membres du conseil de l’ordre dans une déclaration du même jour se désolidarisent. Après un rappel à l’ordre et à nos valeurs, ils déclarent que le GODF :

« ne se trouve nullement lié par la résolution prise dans l’Assemblée du Châtelet »

Le défilé qui suit est extraordinaire, rythmé au son de la mitraille.
Louis Michel dans « La commune, Histoire et souvenir » écrit :

« Ce fut un spectacle comme ceux des rêves que ce défilé étrange »

Les FF se rangent sous leurs bannières, mais il y a aussi des CR+C cordon rouge au cou et des CKS avec leurs écharpes noires et argent, aux côtés des soldats, des francs tireurs, des gardes nationaux.
Le compagnonnage se joint à la protestation. L’opposition est désormais très minoritaire.
Le 5 mai deux ballons aux emblèmes des trois rites emportent vers la province le manifeste :
Les Francs Maçons et les Compagnons de Paris à leurs frères de France et du Monde Entier.
Dans ce long plaidoyer, on peut y lire :
« Armons-nous pour la défense !
Sauvons Paris !
Sauvons la France !
Sauvons l’Humanité !
Paris, à la tête du progrès humain, dans une crise suprême, fait un appel à la maçonnerie universelle, aux compagnons de toutes les corporations ; il crie : A moi les enfants de la veuve ! »
Incidemment nous comprenons qu’au XIXe siècle les liens entre Compagnonnage et F.°.M.° étaient encore bien réels.
Pour terminer écoutons notre F.°. Pyat (1), dans son discours tenu le 29 avril 1871 devant  les 6 000 Francs-Maçons venus de 55 Loges parisiennes :

« Frères, citoyens de la grande partie universelle, fidèles à nos principes communs : Liberté, Égalité, Fraternité, et plus logique que la Ligue des Droits de Paris, vous, Francs-Maçons, vous faites suivre vos paroles de vos actions. Aussi, après avoir affiché votre manifeste – le manifeste du cœur – sur les murailles de Paris, vous allez maintenant planter votre drapeau d’humanité sur les remparts de notre ville assiégée et bombardée. Vous allez protester ainsi contre les balles homicides et les boulets fratricides, au nom du droit et de la paix universelle ». 

(Pyat réussira à gagner l’Angleterre après la défaite de confédérés.)
(1) Discours tenu le 29 avril 1871 devant 6 000 Francs-Maçons venus de 55 Loges parisiennes avant que ceux-ci n’aillent planter leurs bannières sur différentes barricades et, pour beaucoup, se fassent tuer par les versaillais. Le 18 avril 1971, au Palais de la Mutualité, eut lieu la commémoration du centenaire de la Commune de Paris. Sous la présidence de Léo Campion, cette manifestation regroupa toutes les obédiences maçonniques, tous les syndicats, la Ligue de l’Enseignement, la Ligue des Droits de l’Homme, la Ligue Internationale contre le Racisme et l’Antisémitisme, les partis de gauche et… la Fédération anarchiste. Le 24 avril 1971, plus de 3 000 maçons(ne), en tenue, bannières déployées, défilèrent devant le Mur des Fédérés du cimetière du Père-Lachaise.

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Le mur des Féférés

Le 28 avril au bout de la semaine sanglante la Commune avait vécu : écoutons nos Frères Potier & Clémént)
« On l’a  tuée à coup de chassepot. À coup de mitrailleuse » (Victor Parizot- Eugène Potier 1886 « Elle n’est pas morte »)
« Les journaux de l’ex-préfecture,
Les flibustiers, les gens tarés,
Les parvenus par l’aventure,
Les complaisants, les décorés
Gens de Bourse et de coin de rues,
Amants de filles au rebut,
Grouillent comme un tas de verrues,
Sur les cadavres des vaincus. » (Jean-Baptiste Clément- Pierre Dupont 1871 « La semaine sanglante »)
Voilà comment des poètes rendent compte de la tuerie.

 

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Et Après ?

Dans une circulaire du 18 Août 1871 le G.°.M.°. continuera à se désolidariser des « quelques hommes indignes du nom de Franc Maçons. », tout en esquissant  malgré tout, une perspective de réconciliation.
Quels sont  ces Frères indignes ? Certains vous sont connus,   je pense :
Charles Amouroux (réfugié en Belgique), Jaroslaw Dombrowski (blessé mortellement sur la barricade de la rue Myrrha), Emile Eudes (condamné à mort par contumace), Gustave Flourens (idem), Francis Jourde, Charles Longuet, Jean Batiste Millière (fusillé sur le champ par le capitaine Garcin), Eugène Protot (blessé sur les barricades, il réussit à s’échapper) ,  Jules Vallès (condamné à 6 mois de prison), Auguste Vermorel (idem) … et bien d’autres, ils étaient 6000.
Parmi les 55 loges en plus des celles déjà citées : La Rose du parfait silence, l’Etoile Polaire, le Garant d’Amitié, etc.
Ces F F.°. plantèrent leurs bannières sur les remparts et surent mourir pour la Commune.
Le rôle que les F/M dans la Commune n’est pas historiquement majeur, mais il est historiquement important. Et, très important pour nous.
Sans l’abnégation de ces Frères qui mirent les idéaux au-dessus de leur vie, jamais la Franc Maçonnerie n’aurait pu avoir l’influence qu’elle eut sous l’III° République.
Notre ordre aurait fini aux poubelles de l’Histoire avec bien d’autres sociétés réactionnaires.  Ces actes sont fondateurs pour la maçonnerie moderne. Il est dommage que nous n’en parlions pas plus souvent.
Le noir fut moindre que la lumière : c’est la lumière qui a triomphé. Ceux de Mercie furent majoritaires.
Ma conviction c’est que l’engagement de ces Frères ouvrira la voie à la « liberté absolue de conscience » et l’abandon de la référence obligatoire au G.°.A.°.D.°.L.°.U.°. , en 1877, encrant la maçonnerie du GODF du côté solaire.

Rappelons que la commune a « inventé »  la séparation des églises et de l’état, l’enseignement mixte obligatoire, l’égalité des salaires homme/ femme, pour les instituteurs par exemple, un salaire minimum garantit dans les adjudications publiques (évitant le dumping social), la reprise des entreprises abandonnées par les associations ouvrières etc…etc…
Toute une série d’idées dans laquelle la 3° République a puisé quelques dizaines d’années plus tard.
À cette époque, la « progressivité » de notre ordre, son aspiration à la « Libération humaine », en tant qu’appareil, a failli.
Mais, heureusement, par leur engagement personnel, des Frères ont su conserver la confiance du peuple.
Le 16 février 1885, cinq ans après l’amnistie, 10 000 personnes accompagnent la dépouille de Jules Vallès au cimetière du Père-Lachaise.

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Jules Valles

Qui se souvient de Louis Badaud Laribière Gand Maître de l’Ordre qui  condamna l’engagement de ceux ci, dans sa circulaire du 1er Août 1871 ?
Cette action fut celle de Frères et d’Ateliers, pas de la maçonnerie en tant qu’institution.
Nous leur devons beaucoup.
Cela relativise l’influence de la Franc Maçonnerie dans l’histoire. Ce que nous constatons c’est qu’il existe des périodes où le courrant des idées entre en résonance avec une majorité de nos membres. Cela démontre aussi que le conservatisme d’appareil est un danger mortel. C’est vrai en politique, amis aussi pour tout.
Grace à l’engagement de Frères dans la Commune notre ordre a perduré.
Ne pas nous égarer, reste sacré !

BL
2015

Références
Olivier Lissagaray (L’histoire de la Commune de Paris)
La Commune » par le groupe Spartakus (introuvable !)
La Guerre civile en France » de Karl Marx
La guerre de 1870- 1871 et  La Commune de Paris » de Georges Bourgin , conservateur des Archives Nationale, somme de documents et d’iconographie.
Histoire populaire et parlementaire de la Commune de Paris » d’Arthur Arnould (réédité en 2006)
Les Francs-Maçons et la Commune de 1871 » de Gérald Dittmar édité en 2003
Mes carnets rouges » Maxime Vuillaume ed La Découverte 2011
Limousin Espalier « L’Art Royal, trahison et clerc » 1° ed 1999
Franc-Maçonnerie et Faïences»  Nevers Palais Ducal ed C Ghivasky juin 2000
Louis Michel « La commune, Histoire et souvenir »

 

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